SYRIE. Le régime piétine le plan de Kofi Annan
Créé le 10-04-2012 à 05h13 -
Par Le Nouvel Observateur avec AFP
Alors que doit entrer en vigueur dans quelques heures le cessez-le-feu prévu par le plan de sortie de crise, l'armée syrienne poursuit ses attaques.
Les ONG font état de nouveaux bombardements par les forces de Bachar al-Assad ainsi que de combats avec kes rebelles. (YOU TUBE/AFP)
Les forces du régime syrien bombardent toujours, mardi 10 avril, une localité de la province d'Alep, selon une ONG syrienne, alors qu'entre en vigueur le cessez-le-feu prévu par le plan de Kofi Annan. Aucun retrait des forces syriennes n'a été constaté jusqu'à présent, indique ainsi l'Observatoire syrien des droits de l'homme.
"Les chars de l'armée bombardent la localité de Mareh qui est également survolée par des hélicoptères", selon Rami Abdel Rahmane. Des affrontements entre armée et rebelles ont éclaté dans la nuit près de la localité, selon lui, ajoutant que le village voisin de Hour al-Nahr était également bombardé par les forces régulières qui tentent de prendre le contrôle de toute cette région.
"Depuis le matin, Mareh est violemment bombardée par des chars et des mitrailleuses lourdes", rapporte de son côté le militant Abou Omar, qui se trouve dans les environs de la localité. "Des colonnes de fumée sont visibles et des familles fuient la localité", ajoute un militant joint par Skype.
Dans la même journée, six soldats ont été tués mardi dans une attaque à Hassaka, dans le nord-est
Damas déclare avoir commencé à retirer ses troupes
Le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem, a accusé, dans la journée, la Turquie d'armer les rebelles et d'aider les militants à pénétrer en Syrie, des agissements qui sont selon lui en contradiction avec le plan Annan.
"La Turquie soutient les groupes armés illégaux syriens, leur fournit des armes (...) et contribue à la pénétration illégale de militants en Syrie", a déclaré Le chef de la diplomatie au cours d'une conférence de presse à Moscou. "Cela contredit le plan Annan", a-t-il ajouté.
La Syrie a retiré les unités militaires de certaines provinces, a déclaré mardi à Moscou le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Mouallem. Il estime que le cessez-le-feu ne commencera pas avant l'arrivée d'observateurs internationaux.
Il assure que l'armée a "déjà effectué le retrait des unités militaires de certaines provinces". Parmi d'autres mesures prises dans le cadre de l'application du plan Annan, le ministre a cité "la libération de certaines personnes qui ont participé à des troubles".
"Sur fond d'actions positives de notre part, nous constatons l'intensification des agissements de groupes armés dans différentes régions de la Syrie", a-t-il déploré.
La Turquie évoque "une claire violation" de sa frontière
Les tirs provenant de Syrie sur un camp de réfugiés syriens situé en Turquie constituent une "claire violation" de la frontière entre les deux pays, a par ailleurs déclaré le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan depuis la Chine où il se trouve en visite.
Le chef de la diplomatie Ahmet Davutoglu, qui l'accompagne, a décidé d'interrompre sa visite et de rentrer en Turquie à cause de la brusque montée de la tension à la frontière.
"Il s'est produit une très claire violation de la frontière, c'est avéré (...) Nous prendrons évidemment les mesures nécessaires", a affirmé le premier ministre à la presse à Pékin, selon l'agence de presse turque Anatolie.
Le Premier ministre affirme que son pays "usera de tous ses droits découlant du droit international", sans dire cependant si la Turquie envisage d'établir des zones tampon ou des couloirs humanitaires en faveur des populations civiles, comme l'affirment les journaux turcs.
"Que doit faire la Turquie en cas d'une violation de la frontière ? La Turquie agira évidemment comme ont agi d'autres pays, conformément au droit international. Ce droit nous est accordé aux termes du droit international", a-t-il insisté.
La Chine a pour sa part exprimé mardi sa "préoccupation" à la suite de tirs provenant de Syrie sur un camp de réfugiés en Turquie.
L'ONU lance un ultime appel
L'émissaire de l'Onu et de la Ligue arabe sur la Syrie Kofi Annan est arrivé mardi en Turquie, où il devait visiter des camps de réfugiés syriens à la frontière turco-syrienne, a annoncé un diplomate turc.
Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a lancé lundi 9 avril un dernier appel au régime syrien pour qu'il cesse ses attaques contre des civils, à quelques heures de l'expiration du délai pour qu'il retire ses troupes et ses armes lourdes des villes du pays.
"Le secrétaire général demande de nouveau au gouvernement syrien de mettre immédiatement un terme à ses actions militaires visant des civils et de respecter les engagements pris auprès de l'émissaire spécial (de l'ONU et de la Ligue arabe) Kofi Annan", a déclaré le porte-parole de l'ONU Martin Nesirky.
"La chronologie pour la cessation complète de la violence entérinée par le Conseil de sécurité (de l'ONU) doit être respectée par tous sans aucune condition", a ajouté Ban Ki-moon.
Un cessez-le-feu mort-né
Le plan de sortie de crise présenté par l'ancien secrétaire général de l'ONU Kofi Annan, que Damas avait accepté le 2 avril et qui a été entériné par les Nations unies jeudi, prévoit que l'armée se retire des villes mardi matin afin de permettre un arrêt total des violences 48 heures plus tard.
Mais le régime syrien a exigé dimanche que l'opposition s'engage par écrit à arrêter toute forme de violence, avant de procéder à un retrait de ses troupes. Kofi Annan devrait informer le Conseil de sécurité de l'évolution de la situation jeudi, selon des diplomates.
Le secrétaire général de l'ONU a par ailleurs "grandement déploré" les tirs visant la Turquie et le Liban depuis la Syrie survenus lundi. La tension était vive lundi à la frontière entre la Turquie et la Syrie, où, pour la première fois, des tirs en provenance de Syrie ont fait des blessés sur le sol turc, un incident qui provoque la colère d'Ankara à la veille d'une visite de Kofi Annan.
Le chef de la diplomatie syrienne Walid Mouallem doit rencontrer mardi son homologue russe, Sergueï Lavrov, le jour où expire le délai pour que le régime de Bachar al-Assad retire ses troupes et ses armes lourdes des villes syriennes, selon la date butoir fixée par l'ONU.
Un caméraman libanais a par ailleurs été tué lundi à la frontière libano-syrienne, "par des tirs de l'armée syrienne" selon la chaîne privée Al Jadeed pour laquelle il travaillait.